lundi 1 janvier 2007

L'épée de l'orage (David GEMMELL)




RIGANTE : 1 L'EPEE DE L'ORAGE :
Au cœur de montagnes verdoyantes se trouve le petit village rigante de Trois-Ruisseaux, dont les habitants vénèrent les dieux de l’air et de l’eau, et les esprits de la terre. Parmi eux vit un enfant marqué au sceau du destin. Né au cours de l’orage qui condamna son père, il se nomme Connavar.
Bientôt, les récits de son courage se répandront comme un feu de prairie. De l’enfant qui a combattu l’ours, il deviendra l’homme qui a tué le roi ! Il a juré de protéger son peuple et rien ni personne ne pourra se mettre en travers de son chemin. Or, une prophétie a prédit qu’une armée sans pitié traverserait un jour la mer et, telle une avalanche, détruirait tout sur son passage.
Sur cet échiquier, toutes les forces en présence vont jouer leur main : du général Fantôme à la Morrigu, créature maléfique qui hante les bois depuis la nuit des temps, en passant par Jasaray, l’Érudit de Roc, et son armée invincible.
C’est compter sans Connavar, qui s’embarque pour une quête qui le mènera au cœur de l’ennemi. Mais en chemin, il recevra un don : une épée magique. Ainsi obtient-il un nom qui frappera de terreur le cœur de ses amis comme de ses adversaires. Un nom proclamant une destinée glorieuse et après-midière : Démone-Lame.




**FABULEUX ! Un livre qu'on dévore du début à la fin ! Coup de coeur

Note : 3/3



L'Epée de l'Orage, (extrait)
David 
Gemmell
Prologue
La dernière fois que je l’ai vu, j’étais encore un enfant ; garçon maigre aux cheveux blonds qui vivait dans les Highlands. C’était l’après-midi de mon onzième anniversaire. Ma sœur était morte en couches la veille, le bébé avec elle. Mon père, déjà veuf, restait inconsolable, aussi quittai-je la ferme de bonne heure pour le laisser à son chagrin. J’étais triste également, mais comme c’est souvent le cas avec les enfants, je préférais m’apitoyer sur mon sort. En mourant, Ara avait gâché mon anniversaire. Rien qu’à l’évoquer aujourd’hui, j’en frémis encore de honte.
Je m’étais promené dans les bois la majeure partie de la matinée, pour jouer à la guerre. J’étais un héros qui pourchassait ses ennemis. J’étais le plus dangereux épéiste au monde : le roi Démone-Lame.
Je l’avais rencontré une fois auparavant, lorsqu’il était entré à cheval avec plusieurs de ses compagnons dans notre ferme isolée. Ils ne faisaient que passer, mais mon père leur avait offert de l’eau et un peu de pain. Le roi avait mis pied à terre pour venir remercier père ; ils avaient parlé de la sécheresse de l’été et des problèmes qui en découlaient. Je crois que je devais avoir dans les cinq ans ; tout ce dont je me souviens, c’est qu’il était très grand et que ses yeux étaient bizarres : l’un était marron fauve, l’autre vert, comme un joyau. Mon père lui avait raconté que notre unique taureau était mort, frappé par la foudre. Trois jours plus tard, un cavalier était venu avec un magnifique taureau à longues cornes, et nous l’avait offert. Après cela, mon père était devenu un fidèle du roi.
J’avais juste onze ans lorsque je l’ai revu. Fatigué de jouer tout seul, j’étais parti chez mon cousin dans la vallée du Rift à quelque cinq kilomètres de la maison. Il m’avait donné à manger et je l’avais aidé à couper du bois. Je faisais rouler les bûches jusqu’à lui et les plaçais sur la souche. D’un coup de hache, il les fendait en deux. Après avoir fini de le couper, nous avions rangé le bois en piles derrière le mur nord de la maison.
Comme j’étais fatigué, j’aurais bien voulu dormir là, mais je savais que père serait inquiet. Aussi, une heure avant la tombée de la nuit, je pris le chemin de la maison, à travers les collines de Balg jusque dans les bois. Mon trajet me fit passer près du vieux cercle de pierres. Père m’avait raconté que des géants l’avaient bâti dans un âge défunt, mais ma tante, elle, pensait que c’étaient en fait des géants transformés en pierre par une malédiction de Taranis. Je ne sais pas laquelle des deux histoires est vraie, mais le cercle est un lieu merveilleux. Dix-huit énormes pierres dressées, mesurant chacune plus de six mètres de haut, en roche dure et dorée, et qui donc ne ressemblent en rien au granit grisâtre qu’on trouve dans les montagnes Druagh.
Je n’avais pas vraiment l’intention de me rendre dans le cercle, car ce n’était pas exactement mon chemin. Mais, alors que j’avançais au milieu des arbres, je vis une meute de loups. Je m’arrêtai pour ramasser une pierre. Les loups attaquent rarement les hommes. Ils préfèrent nous éviter. Je les comprends. Nous les chassons pour les tuer dès que nous en avons l’occasion. Le chef de la meute se tenait immobile et me fixait de ses grands yeux dorés. Un frisson me parcourut et j’eus la certitude que ce loup n’avait pas peur.
L’espace d’un instant, je lui renvoyai son regard. C’est alors qu’il s’élança comme une flèche. Je laissai tomber ma pierre et, faisant demi-tour, m’enfuis à toutes jambes. Je savais qu’ils étaient à mes trousses, aussi courais-je le plus vite possible, sautant par-dessus des troncs d’arbres, et me frayant un passage à travers les fougères. Sous le coup de la panique, je fuyais sans savoir où j’allais. J’arrivai à la limite supérieure des bois, à quelques mètres à peine du cercle de pierres. Continuer signifiait ma mort. Cette prise de conscience soudaine me permit de maîtriser ma peur, et mon esprit commença à voir plus clair.
Il y avait une branche basse devant moi. D’un bond, je l’attrapai et me hissai dessus. Le chef de la meute était juste derrière moi. Lui aussi bondit, et ses dents se refermèrent sur ma chaussure, l’arrachant de mon pied. Je grimpai un peu plus haut et les loups s’installèrent en silence au pied de l’arbre.
À présent en sécurité, je laissai la colère l’emporter. Contre moi-même et contre les loups. Je cassai une branche sèche et la lançai sur la meute. Ils s’écartèrent et se mirent à tourner autour de l’arbre.
C’est à ce moment-là que j’entendis des cavaliers. Les loups se dispersèrent et décampèrent dans les bois. J’étais sur le point d’appeler les nouveaux venus quand quelque chose m’arrêta. Je ne peux dire quoi. Je ne crois que pas que c’était de la peur, mais une sorte de sentiment de danger imminent. Quoi qu’il en soit, je m’allongeai sur l’épaisse branche afin de voir les cavaliers pénétrer dans le cercle de pierres. Ils étaient neuf. Tous portaient dagues et épées. Leurs habits étaient de bonne qualité, et leurs chevaux très grands, comme ceux que chevauchaient les Loups de fer du roi. Ils mirent pied à terre et sortirent du cercle pour aller attacher leurs montures non loin.
— Tu penses qu’il va venir ? s’enquit l’un d’entre eux.
Je le revois comme si c’était hier : grand, large d’épaules, les cheveux blonds nattés sous un heaume de fer bruni.
— Il va venir, répondit un autre. Il souhaite la paix.
Ils rejoignirent leurs camarades qui s’étaient assis à l’intérieur du cercle. N’ayant pas encore décidé de révéler ma présence, je restai silencieusement allongé. Ils parlaient à voix basse et je n’arrivais à discerner clairement que quelques mots.
Le soleil descendait et je me décidai à affronter les loups pour rentrer chez moi. C’est alors que j’aperçus le cavalier sur l’étalon blanc. Je le reconnus aussitôt.
C’était Démone-Lame, le roi.
Je ne peux pas vous dire à quel point j’étais excité. Même à l’époque il était déjà presque un mythe. Sa barbe rougeoyait comme de l’or dans le soleil couchant. Il portait un heaume d’argent étincelant à ailettes, un plastron embossé d’un faon pris dans des ronces, blason de sa maison, et sa fameuse cape en patchwork. Ceinte à sa taille se trouvait la légendaire épée Seidh avec sa poignée en or. Il entra dans le cercle et arrêta son étalon. Puis il contempla les hommes réunis. J’avais l’impression qu’ils étaient tendus, presque effrayés par sa simple présence. Comme il descendait de selle, les hommes se levèrent.
Je voulais descendre pour m’approcher de cette légende vivante, quand il dégaina son épée et la planta dans la terre devant lui. L’homme aux cheveux blonds nattés fut le premier à parler.
— Joins-toi à nous, Connavar. Parlons d’un nouveau traité de paix.
Démone-Lame resta silencieux un instant, ses grandes mains posées sur le pommeau de son épée, sa cape en patchwork virevoltant dans la brise.
— Vous ne m’avez pas fait venir ici pour parler, dit-il d’une voix forte et profonde. Vous m’avez fait venir pour que je meure. Alors, venez, traîtres. Je suis là. Et je suis seul.
Lentement, ils dégainèrent leurs épées. Je pouvais sentir leur peur.
Puis, alors que le soleil tombait dans une gerbe de feu pourpre, ils passèrent à l’attaque.

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